
Portail Sainte-Anne © Julie de Lagaye
Marie visite sa cousine Élisabeth
L’annonce de la naissance d’un sauveur faite à Marie par l’ange Gabriel a été une grande joie, c’est pourquoi Marie, bien qu’enceinte, n’hésite pas à se mettre en mouvement pour aller visiter sa cousine Élisabeth et parcourir plus de 100 kilomètres entre Nazareth et la région montagneuse de la ville de Juda ou réside sa cousine (le nom de cette ville n’est mentionnée ni dans les canoniques ni dans les apocryphes).
Élisabeth descend d’Aaron (Lc 1, 5) — Aaron avait également une femme du nom d’Élisabeth (Élichéba en hébreu, cf. Ex 6, 23) — donc également Marie qui est sa cousine. Cette tribu détenait le pouvoir sacerdotal. Quant à Joseph, d’après sa généalogie, il descend de la tribu de Juda (Mt 1, 1-2) qui est celle qui détient le pouvoir royal (Gn 49, 10 Mi 5, 1 ;Mt 2, 6 ;Ap 5, 5, etc.).
Donc, par ses deux parents, Jésus reçoit à la fois le pouvoir royal et le pouvoir sacerdotal, le matériel et le spirituel, auxquels s’ajoute le pouvoir divin par Son Père céleste et le pouvoir humain en tant que fils d’Homme.
Toutefois, derrière la double nature du Christ se cache un double doute sur ses origines (non mentionné sur le tympan de Notre‑Dame).
Le premier doute, mentionné dans l’évangile de Matthieu, est celui de Joseph qui, absent au moment de l’Annonciation et de la Visitation, pense que Marie est enceinte d’un autre homme. Il envisage donc de la répudier discrètement pour ne pas lui attirer d’ennui. Mais un ange le rassure et Joseph accepte de prendre Marie avec lui (Mt 1, 18‑25).
Le second doute concerne les accusations contre Joseph parce qu’il aurait rendu Marie impure en la mettant enceinte (Protévangile XV, 1‑XVI, 3 ; Pseudo‑Matthieu XII). Le Grand Prêtre leur fait boire de « l’eau de l’épreuve rituelle » (Protévangile XVI, 1) qui dessèche les coupables (Nb 5, 27) et comme tous les deux s’en sortent sans dégâts, le Grand Prêtre et tout le peuple sont obligés de reconnaître leur innocence.
Ainsi, à travers ces nombreux détails, les auteurs de ces textes insistent sur le caractère exceptionnel de la naissance de jésus le Messie et de Jean‑Baptiste son prophète. L’une trop jeune, l’autre trop âgée, rien ne semblait indiquer qu’elles allaient enfanter mais, « Rien n’est impossible à Dieu » (Lc 1, 37). Le tressaillement de Jean le Baptiste dans le ventre de sa mère en reconnaissant le Christ préfigure son rôle de dernier prophète à annoncer la venue du Messie.
Sources évangéliques
En ces jours-là, Marie partit et se rendit en hâte vers la région montagneuse, dans une ville de Juda. Elle entra chez Zacharie et salua Élisabeth.
Et il advint, dès qu’Élisabeth eut entendu la salutation de Marie, que l’enfant tressaillit dans son sein et Élisabeth fut remplie d’Esprit Saint. Alors elle poussa un grand cri et dit : « Bénie es-tu entre les femmes, et béni le fruit de ton sein ! Et comment m’est-il donné que vienne à moi la mère de mon Seigneur ? Car, vois-tu, dès l’instant où ta salutation a frappé mes oreilles, l’enfant a tressailli d’allégresse en mon sein. Oui, bienheureuse celle qui a cru en l’accomplissement de ce qui lui a été dit de la part du Seigneur ! »
Sources apocryphes
Pleine de joie, Marie se rendit chez sa parente Élisabeth et frappa à la porte. En l’entendant Élisabeth jeta l’écarlate, courut à la porte, ouvrit, et la bénit en ces termes : « Comment se fait-il que la mère de mon Seigneur vienne à moi ? Car vois-tu, l’enfant a tressailli et t’a bénie. »
Or Marie avait oublié les mystères dont avait parlé l’ange Gabriel. Elle leva les yeux au ciel et dit : « Qui suis-je, pour que toutes les femmes de la terre me proclament bienheureuse ? »
Et elle demeura trois mois chez Élisabeth.
L’Évangile du Pseudo‑Matthieu ne mentionne pas la visitation de Marie à sa cousine. Quant au Livre de la nativité, il s’achève sur la décision de Joseph de ne pas répudier Marie et de la prendre avec lui, sans mentionner non plus la visitation. Toutefois, il y est précisé :
Il serait trop long de vouloir insérer dans cet opuscule tous les événements dont nous avons lu qu’ils ont précédé ou qu’ils ont suivi la naissance du Seigneur. Omettons donc ce qui est écrit de manière plus complète dans l’Évangile et passons au récit de ce qui s’y trouve moins amplement.